jeudi 23 novembre 2006

A Bobigny, trois policiers jugés pour violences

Les trois agents sont soupçonnés d'avoir frappé des habitants après un banal contrôle sur la dalle de la place du Caquet au centre de Saint-Denis, en octobre 2001.

Par F.Ta.
LIBERATION.FR

Trois policiers comparaissent depuis ce matin, à 9h, devant le tribunal correctionnel de Bobigny pour des violences commises en 2001 sur des habitants de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), impatients de voir enfin jugée l'une des affaires qui a terni l'image du commissariat de la ville.

Cinq ans après les faits, le procès devrait enfin pouvoir se dérouler, après avoir déjà été reporté quatre fois en un an en raison d'erreurs répétées des services du tribunal chargé de citer officiellement le Trésor public.

Les trois agents de police, âgés de 20 à 30 ans en 2001, sont soupçonnés d'avoir frappé des habitants après un banal contrôle sur la dalle de la place du Caquet au centre de Saint-Denis. Ce 17 octobre 2001, Juliette, Imane, Houria et d'autres habitants du centre de Saint-Denis descendent au pied de leur immeuble pour tenter d'apaiser la tension entre la police et une poignée de jeunes, après un début d'enquête sur un vol de portable. Le ton monte et les patrouilles de police arrivées en renfort bousculent, matraquent et gazent plusieurs habitants, selon leurs témoignages consignés dans les plaintes.

Huit personnes sont embarquées au commissariat. Relâchées deux heures plus tard, elles vont faire constater leurs plaies et leurs bosses occasionnant des interruptions temporaires de travail de cinq à quinze jours, et déposent plainte à la brigade de gendarmerie de Saint-Denis. Il faut attendre dix-huit mois pour que trois policiers soient mis en examen pour «violences par personne dépositaire de l'autorité publique» et laissés libres.

Juliette, éducatrice, l'une des quatre personnes dont la plainte a été retenue, a raconté qu'un policier l'a fait tomber et l'a menottée. «Il était à cheval sur moi. Plus je criais, plus je me faisais frapper. Il cognait ma tête sur le sol», dit-elle. La jeune femme, qui a souffert d'un traumatisme crânien et ressent encore des douleurs aux cervicales, attend d'être «enfin reconnue comme victime», après, affirme-t-elle, de nombreuses pressions pour retirer sa plainte.

Cet incident, ajouté à d'autres affaires (agressions sexuelles de prostituées pour lesquelles 5 policiers ont été condamnés à de la prison ferme en avril 2006, tirs contre un camp roumain...) nourrit depuis plusieurs années un climat de défiance à Saint-Denis, entre une partie des habitants et les policiers locaux. Selon un audit de l'Inspection générale des services (IGS), 24 policiers de Saint-Denis ont été mis en examen entre 2000 et 2005 dans diverses enquêtes. Le commissaire a été suspendu à la fin de l'été 2005. Durant ces années, la municipalité communiste a dénoncé le «manque criant d'encadrement» à l'origine, selon elle, de «manquements inadmissibles à la déontologie» au sein du commissariat.

A la suite de ces événements, des habitants ont mis en place un comité pour les droits, la justice et les libertés. Ce collectif de citoyens ordinaires scrute depuis les faits et gestes des forces de l'ordre dans la banlieue nord de Paris.

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